Pédagogie. L'avènement des cours à distance - grand gagnant du confinement

L’avènement des cours à distance était annoncé de longue date. Le numérique est maintenant au centre du jeu. Récit d’une explosion.

Pédagogie. L'avènement des cours à distance - grand gagnant du confinement

    Cela couvait, certaines écoles ayant déjà amorcé leur virage digital. C’est le cas de Emlyon Business School qui, ces dernières années, a massivement investi dans ce domaine : « Nous nous réjouissons que la stratégie mise en place ait porté ses fruits », applaudit Bénédicte Bost, directrice de la RSE et de la communication interne de Emlyon. Et elle ajoute, qu'en ce qui concerne l’infrastructure, la charge a été lourde : « Pour le seul mois d’avril, nous avons assuré 3 300 cours en ligne, soit 7 300 heures et 113 000 participants

    Innover et anticiper

    Un flux soudain qu’a aussi dû affronter Audencia, la grande école nantaise : « Nous avons pris le parti de n’arrêter les cours qu’une semaine », relate Valérie Claude-Gaudillat, directrice d’Audencia Innovation. Après la formation de plus de 250 personnes et la vérification d’innombrables détails (connexions, systèmes d’exploitation, mises en place de procédures particulières), la continuité pédagogique d’Audencia est assurée. Et l’école précise aussi qu’elle « a anticipé que le confinement durerait davantage que les deux semaines initialement annoncées » et prévu de poursuivre ainsi jusqu’à l’été.

    Les écoles, surtout parisiennes, remercient à mots couverts les mouvements sociaux de l’automne qui, rétrospectivement, ont fait office de répétition générale du e-learning. Une préparation à « ce crash test grandeur nature nommé Covid », confirme Laurent Espine, directeur général de l’Idrac BS, présente dans neuf villes françaises. « Aujourd’hui, nous avons produit l’équivalent de 250 longs-métrages de deux heures. »

    Ça marche !

    L’autre grande satisfaction concerne les étudiants. « Leur engagement et leur présence en ligne sont même supérieurs ! » observe Laurent Espine. Un phénomène constaté partout et qui tient à plusieurs facteurs : la qualité, bien sûr, de l’enseignement proposé, mais aussi la nouveauté et la forte dynamique collective qu’engendre un tel événement.

    « Maintenant, il faut aller plus loin », précise la directrice Innovation d’Audencia. Car le distanciel, « ce n’est pas simplement la mise en ligne du présentiel », abonde Christophe Mouysset, directeur des relations entreprises de Kedge BS. Pour donner toute sa mesure, un cours enseigné à distance doit avoir été conçu pour l’être et réunir une panoplie de dispositifs. Il peut être synchrone (toute la classe se connecte en même temps) ou asynchrone : comporter des forums pour échanger, un système d’évaluation, des capsules multimédias…

    « Pour la transmission du savoir pur, le distanciel offre plus de possibilités que le présentiel. Mais une formation ne se limite pas au savoir », tempère Christophe Mouysset, rappelant l’importance des expériences vécues. Il résume ainsi la situation : « Nous étions figés dans une approche dogmatique, avec les pro et les anti. Désormais, nous pouvons être pragmatiques. Songez qu’il y a vingt ans, tout se serait arrêté… »

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    « La nécessité est mère de l’invention »

    Frank Bournois Directeur général d'ESCP Business school (à droite sur la photo ci contre)

    Philippe Houzé Président du directoire du groupe Galeries Lafayette et Président du conseil d'administration d'ESCP Business school

    Le digital vous a-t-il épatés ?

    Frank Bournois :

    Ce qui nous a épatés, c’est l’engagement extraordinaire de nos professeurs et collaborateurs. Vient ensuite le digital, bien sûr. Avec nos sept campus, nous sommes habitués à travailler à distance, mais c’est la première fois que nous devions traiter un volume aussi massif et soudain.

    Philippe Houzé : La nécessité est mère de l’invention, comme disent les Anglo-Saxons. Dans ces périodes complexes, des choses merveilleuses se passent et nous mesurons l’étendue de nos ressources.

    Le monde sera-t-il moins mobile demain ?

    F.B. :

    Le numérique a prouvé son efficacité. De là à imaginer une mondialisation purement digitale, non. Car la crise a aussi montré une chose : côtoyer nos étudiants et nos équipes nous manque terriblement !

    P.H. :

    Je vais dans le sens de Frank, d’autant plus avec ma casquette de commerçant. Le contact humain est irremplaçable. Il faut néanmoins constater que les dernières barrières du distanciel sont tombées. Il fait maintenant partie intégrante de notre manière de vivre, de travailler, d’acheter. Nous nous sommes aussi habitués à respirer un air moins pollué. Certes, c’est un autre sujet, mais nous ne pourrons plus l’éviter longtemps.

    Quelle leçon vos étudiants doivent-ils en tirer ?

    P.H. :

    Lorsqu’on me présente un plan stratégique, il m’arrive de dire : « Vous oubliez le Black Swan (cygne noir, NDLR). » C’est-à-dire, cet élément imprévu qui peut tout renverser et rendre caduque le meilleur des projets. Nos étudiants devront garder à l’esprit l’idée que le risque peut toujours se réaliser.

    F.B. :

    Une grande école comme ESCP Business School doit construire un nouveau modèle de leadership, où la capacité d’adaptation et la compréhension des enjeux de la technologie sont essentielles. Nous avons opéré une refonte de nos programmes, avec notamment près d’une trentaine de nouvelles spécialisations, pour que nos étudiants bénéficient d’un parcours plus personnalisé, en phase avec leurs projets et les compétences clés du monde de demain.

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